Monastère des dominicaines de Lourdes

 

La prière
Témoignage de soeurs

La prière, une longue patience

Tout l'environnement porte à chercher des expériences immédiates. Et sur le plan religieux, les Evangéliques et les Pentecôtistes sont en phase avec la quête de beaucoup. Alors que deviennent les monastères? Ils paraissent d'un autre âge.

Fidèles à la foi catholique, qui nous dit que Dieu agit lentement dans une histoire, ils proposent une expérience de Dieu sur la durée, et même une longue durée: toute une vie. Cela représente une longue patience, car pas de prière sans conversion au jour le jour, sans un approfondissement de la foi, sans une lecture de l'Ecriture qui ne devient lumière que très lentement; pas de prière sans avoir accepté la croix qui se présente un jour ou l'autre dans la vie; pas de prière sans l'intégration des tensions inhérentes à une vie en communauté, qui ne conduisent à la paix qu'au prix d'un long renoncement.

Et le but n'est jamais atteint: on ne peut que tendre vers lui. Car qui peut vivre tout de suite d'une foi lumineuse? de la plénitude de la charité? C'est un don qu'il faut longuement demander dans la prière.
C'est une grande illusion que de croire qu'il suffit de dire: "Dieu m'aime", pour être arrivé au terme du chemin qui se déroulerait ensuite comme un long fleuve tranquille. Reconnaître l'amour dont Dieu nous aime est un point de départ qui accompagne souvent une conversion. Mais la conversion s'approfondit ensuite tout au long de la vie.

La patience dans la prière conduit à dire avec de plus en plus de profondeur la prière de Jésus: Père, non pas ma volonté, mais la tienne. Voilà de quoi remplir la vie d'une moniale.

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Prière de bénédiction

Dans notre petit coin de paradis, toute la création chante la louange du Seigneur.

Ciel étoilé et soleil brûlant,
bénissez le Seigneur,
brumes et pluies,
bénissez le Seigneur.

Cèdres et sapins,
bénissez le Seigneur,
chênes et châtaigniers,
bénissez le Seigneur.

Merleau et bergeronnette,
bénissez le Seigneur,
agneaux et brebis,
bénissez le Seigneur.

Collines et prairies,
bénissez le Seigneur.
truites et Gave de Pau,
bénissez le Seigneur.

Notre-Dame et Bernadette,
bénissez le Seigneur,
pèlerins proches et lointains,
bénissez le Seigneur.

Marie de Nazareth et Marie Réginald,
bénissez le Seigneur,
sœurs du ciel et sœurs de la terre,
bénissez le Seigneur.


La prière pour le salut de tous les hommes

Le salut de tous les hommes, voilà ce qui habitait le cœur de Dominique quand il était chanoine à Osma. Jourdain de Saxe nous rapporte qu' «Une de ses demandes fréquentes et singulières à Dieu était qu'il lui donnât une charité véritable et efficace pour cultiver et procurer le salut des hommes: car il pensait qu'il ne serait vraiment membre du Christ que le jour où il pourrait se donner tout entier, avec toutes ses forces, à gagner des âmes, comme le Seigneur Jésus, sauveur de tous les hommes, s'est offert tout entier pour notre salut.»

Dominique veut collaborer au salut des hommes auquel Jésus avait consacré toute sa vie. N'est-ce pas pour cela que son Père l'avait envoyé parmi nous? Il connaît le chemin à suivre: avoir dans le cœur une charité véritable et efficace. Cette charité est un don de Dieu; il la demandait donc instamment dans ses prières. Pourquoi une telle demande? Il désirait, en effet, être uni totalement au Christ, être en vérité un de ses membres; et il sait que seule la présence en soi de la charité qui habite le cœur du Christ, rend possible une telle union. Or cette charité s'est exprimée avec toute son ampleur dans l'offrande de Jésus à son Père sur la croix, pour notre salut. Entrer dans cette offrande, la prolonger, avoir une aussi grande charité dans le cœur, va de pair avec un immense désir de collaborer au salut des hommes. Car être habité par la charité du Christ, conduit à faire siens ses sentiments, ce qui est le moteur de sa vie. Il n'est pas possible d'être uni au Christ, à notre Sauveur, sans partager son désir du salut de tous les hommes.

C'est dans cette prière que s'enracine la vocation du fondateur de l'Ordre des Prêcheurs qui est un Ordre missionnaire, voué à annoncer le nom de Notre Seigneur Jésus Christ, sauveur de tous les hommes. A la source de la prédication des dominicains, il y a donc une union au Christ, un cœur rempli de charité, qui conduisent à l'offrande de soi pour le salut du monde. Et les moniales, au cœur de l'Ordre des Prêcheurs, rappellent par leur vie cachée consacrée à la prière, que telle est la racine qui porte l'Ordre: la charité qui emplissait le cœur du Christ sur la croix peut suffire, à elle seule, à gagner des âmes au Seigneur.

Prier pour le salut de tous les hommes est donc avant tout une affaire de cœur, de conversion du cœur à la charité. C'est un combat incessant contre tout ce qui replie sur soi. Et comme Dominique, les moniales mène tous les jours un combat contre tout ce qui détourne le cœur de cette charité. Comme Dominique, elles se mettent à l'école de Cassien pour purifier leur cœur des vices qui le rongent et laisser toute la place à la charité. C'est faire de sa vie un véritable sacrifice au quotidien, qui se vérifie dans les humbles réalités de la vie commune.

Les moniales peuvent avoir, à travers des rencontres, à travailler au salut des autres par la parole. Mais cela n'est que feuille morte si la conversion à la charité n'est pas au cœur de leur vie; si leur souci du salut de tous les hommes ne s'enracine pas dans la contemplation de notre Sauveur sur la croix, dans la charité même du Christ.


La prière d'intercession des moniales

Intercéder pour le monde et pour l'Eglise, pour les personnes qui traversent des difficultés, c'est bien là, pour beaucoup, le rôle essentiel des monastères. Ils ont une grande confiance dans l'intercession des moniales. De très nombreuses demandes de prière arrivent, en effet, par le site de la communauté ou par des communications téléphoniques. Ce sont bien souvent des appels au secours concernant la santé, la situation financière, familiale ou professionnelle, ou encore des emprises démoniaques, et bien d'autres aspects de la vie: parfois aussi l'action de grâces. Tout cela est communiqué à toutes les sœurs de la communauté pour être confié à leur prière. Bien sûr, les moniales sont aussi démunies que tout le monde face à ces grandes détresses et, sans une grande confiance dans le Seigneur, il y aurait de quoi déprimer devant tant de souffrances.

Alors qu'est-ce que l'intercession?
Intercéder, c'est d'abord croire que le Seigneur est présent dans le cœur de tout homme, qu'il l'entoure de son amour. C'est un cri de confiance comme celui qui sortait de la bouche des psalmistes, pour ceux qui, dans leur souffrance, n'ont plus la force de tenir seuls devant Dieu et ont besoin d'être soutenus par d'autres.
Intercéder, c'est s'ouvrir à la dimension missionnaire de la prière, à sa dimension ecclésiale.
Intercéder, c'est rassembler dans le creux de son cœur, toutes les personnes qui se sont confiées à notre prière, les présenter devant le Seigneur qui, lui, connaît ce qui est bon pour chacun. C'est un acte de confiance en Dieu qui n'exauce pas forcément la matérialité de ce que les uns ou les autres espèrent recevoir de lui; souvent il veut faire découvrir le don encore plus grand qu'il désire faire, parfois après un long tunnel.
Intercéder, c'est être en face de sa propre pauvreté et de son impuissance, et s'en remettre au Seigneur. C'est une épreuve de vérité pour la foi. Dieu est-il encore, oui ou non, au milieu de nous, dans notre désert? Il ne faut pas douter que le Seigneur nous exauce avant même que nous lui demandions; il sait ce dont chacun a besoin. Mais il veut avoir besoin de la prière des uns pour les autres. Il donne plus que nous demandons, et différe souvent la réponse pour purifier notre désir. Quand on a présenté à Dieu une demande et que l'on n'obtient pas ce que l'on désirait, il ne faut donc pas répéter sa prière, pensant que Dieu ne nous a pas entendus, puisque nous ne sommes pas exaucés comme nous le désirions. Il faut croire que nous sommes exaucés. L'intercession est une chemin de purification de la foi; elle fait grandir dans la confiance et l'abandon entre les mains du Seigneur.
L'intercession apprend à entrer peu à peu dans la prière du Christ qui intercède sans cesse pour nous devant Dieu.

Quelques sœurs sont poussées intérieurement à prier plus particulièrement pour une intention ou pour une autre. Par exemple, notre sœur Marie de Nazareth intercédait et intercède encore tout particulièrement pour les couples qui désirent avoir un enfant. D'autres prieront intensément pour les enfants, comme notre sœur Marie-Réginald. D'autres pour les vocations, d'autres pour le Pape, les prêtres, etc.


La prière de demande
Pourquoi donner une si grande place à la prière de demande? Que demander? Comment demander?
Une moniale témoigne

Jésus a enseigné la prière de demande à ses disciples: Eh bien, moi, je vous dis : demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira (Lc 11,9). Il semblerait que la louange aurait dû avoir la première place, Mais il n'en est rien. On lit aussi dans l'évangile de saint Marc: Alors Jésus, prenant la parole, leur dit : «Ayez foi en Dieu. Amen, je vous le dis : quiconque dira à cette montagne : “Enlève-toi de là, et va te jeter dans la mer”, s’il ne doute pas dans son cœur, mais s’il croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé ! C’est pourquoi, je vous le dis : tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l’avez obtenu, et cela vous sera accordé» (Mc 11,22-24). Croire en Dieu, c'est croire qu'il peut agir. En lui demandant quelque chose, je crois que j'ai reçu ce que j'ai demandé et cela me sera donné puisque je l'ai déjà obtenu.
La prière de demande est donc un baromètre de notre foi. Trois attitudes, en effet, peuvent sous-tendre la prière de demande.

La première s'apparente à la magie: c'est une pratique centrée sur soi qui a pour but de demander à Dieu de nous tirer d'affaire: Dieu se doit d'intervenir quand je le lui demande. La prière de demande est alors, comme la magie, une pratique destinée à intervenir de façon surnaturelle sur le cours des événements ou sur le comportement d'autrui, par l'intermédiaire de Dieu. Tout ce dont nous avons besoin défile alors dans la prière au fil des jours: la santé, la fortune, le bien-être, le travail, la délivrance des ennemis… Sûrs de la puissance de la prière, nous ne pouvons pas ne pas le recevoir, pensons-nous alors. C'est le Dieu tout puissant, capable de tout qui est invoqué. Il suffit que je le lui demande pour qu'il le fasse: magie.

La seconde attitude qui anime la prière de demande, peut être un manque de foi: je n'y crois pas vraiment, mais dans le doute, je peux essayer de demander… au cas où cela marcherait. Je n'y crois pas trop, mais peut-être que Dieu m'accordera ce dont j'ai besoin? Cette seconde attitude diffère peu de la première, mais cette fois je ne suis pas sûr d'avoir un pouvoir sur Dieu.

Quant à la troisième attitude, c'est la foi. C'est la prière de demande que Jésus nous a enseignée. Le plus bel exemple est celui qu'il nous en a donné à Gethsémani: «Père, que ta volonté soit faite… non pas ma volonté, mais la tienne». Et il a obtenu le salut du monde. C'est une adhésion personnelle à Dieu, une communion, qui est au fondement. Non seulement je crois que Dieu vient à mon aide, mais qu'il le fait pour que je sois au service du Royaume. Dieu sait tout, il peut tout, mais pour accomplir son œuvre il veut avoir besoin de notre prière. Participer à la puissance de Dieu en quelque sorte, est un don fait en réponse à notre prière. Si notre volonté est unie à celle de Dieu, alors il n'est pas besoin de demander plusieurs fois la même chose: une fois suffit, le reste appartient à Dieu.

Cela fait partie de la vocation même d'une moniale de mener le combat que demande la prière de demande qui va de pair avec une conversion de chaque instant: renoncer à sa volonté pour ne chercher que celle de Dieu ne se fait pas en un jour. Il n'est donc pas trop de toute une vie pour passer d'une forme de prière qui par bien des côtés s'apparente à la magie, à une prière où la volonté de Dieu est devenue le moteur de la vie.

 

Prière missionnaire de soeur Marie de Nazareth

 

Grâces reçues durant la neuvaine de la Pentecôte 1923

Depuis bientôt deux ans, Jésus me sollicitait intérieurement par sa grâce, de me donner à lui, de me livrer à son amour pour la conversion des infidèles, offrant chaque jour large part de mes travaux, fatigues, souffrances, pour la mission du Brésil, pour les petits apostoliques du révérend Père Bigorre. De grand coeur, je me livrerai à cet attrait de grâce, mais il fallait l'approbation de mon confesseur, de ma bonne Mère Prieure. Je les ai eues et me voilà missionnaire.

Ô non, je ne veux pas traîner dans la vie religieuse une vie inutile, car je sais ô Jésus, que l'amour que je sens pour vous dans mon coeur peut féconder mes moindres actes, même lever une paille de terre. Oh! que je suis donc heureuse, ô Jésus, dans mon humble vocation, quel bonheur d'avoir toujours la dernière place, de n'avoir jamais à me mettre en avant, de pouvoir toujours cacher aux regards mêmes de mes Mères et de mes soeurs, les attraits de mon humble et obscur apostolat.
Mais je ne vais pas oublier maintenant la ferveur que je dois par mon travail et ma générosité, ma prière, à ma chère mission du Brésil. Oh celle-là, elle aura toujours la part de choix dans ma vie. Je l'aime tant cette chère mission, je veux travailler et souffrir pour elle; que nos Pères aient les joies, moi je veux les souffrances, ma petite part intime, pourvu que vous soyiez là.
Que le bon Père Bigorre ait des grâces, des lumières spéciales pour former et diriger ses petits apostoliques, qu'ils fassent un jour de saints prêtres; et que tous nos Pères qui lui succèderont aient aussi les mêmes grâces et aussi les mêmes (et plus) secours temporels pour nourrir ces chers petits.

[...]
Que Mgr Thomas et le Père Antoine Sala aient la joie de voir se convertir toutes leurs tribus d'Indiens. Oh! ces chers Indiens, mes frères, ce que je les aime!… et combien je sens mon âme portée sans cesse à prier pour eux et à me sacrifier pour leur salut. Enfin le bon Père Réginald. Oh! faites, ô Jésus, qu'il fasse beaucoup de bien lui aussi dans la mission à travers ce grand Brésil. Préservez-le des serpents et des fauves de la forêt et donnez-lui des âmes, beaucoup d'âmes, toutes les âmes. Enfin à tous nos Pères, frères et soeurs qui travaillent là-bas, donnez-leur force et courage, lumières et consolations; et si parfois l'ennui, le dégoût, la tristesse viennent envahir leurs âmes, oh je vous en prie, donnez-la moi plutôt, pourvu ô Jésus que vous m'aidiez de votre grâce et que vous me fassiez sentir que c'est l'heure de mon apostolat. Je ne parle ici que de mes frères que je connais, mais j'entends envelopper dans mes intentions et mes prières tous ceux qui viendront après eux et cela jusqu'au jugement dernier car, ô Jésus, après ma mort je ne veux pas rester inactive, mais travailler encore à sauver les âmes. Aussi je vous demande de ne pas me garder dans votre beau ciel mais, lorsque je paraîtrai devant vous et que vous m'aurez jugée, lorsque vous m'aurez dit: «C'en est fait, tu m'aimeras toujours, tu ne te sépareras jamais de moi; ton salut est assuré»; alors je vous embrasserai et je partirai à la conquête des âmes. J'irai faire mon purgatoire, si vous le voulez bien, au milieu des sauvages du Brésil et aider nos Pères à les convertir.
Non, non, ô Jésus. Vous voir, vous aimer, oui, mais me reposer, non. Jusqu'au jugement dernier, si vous ne me trouvez pas digne de la grâce que je vous demande en ce moment, mon Jésus, eh bien, mettez-moi plutôt à la porte de l'enfer. Je veux empêcher les âmes d'y tomber. Cela me sera-t-il possible, ô Jésus? Je ne voudrais que des élus qui vous glorifient.

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